Des cafés, des terrasses, des restos asiatiques. Et pas grand-chose d’autre. Les riverains du quartier Saint-Géry, en face de la Bourse à Bruxelles, se plaignent des nuisances que la fonction de plus en plus homogène de leur pâté de maisons répercute sur leur quotidien. Mégots de cigarettes, urines, déchets, violence et bagarres, tapage nocturne. Avec les odeurs des restaurants, ils mangent asiatiques dès le petit-déjeuner. Sans parler des bars qui se transforment en discothèque dès minuit passé.
Marc De Maeyer, vous habitez depuis 19 ans à Saint-Géry. Que reprochez-vous aux autorités?
Avant tout le sentiment d’impunité qui règne dans le quartier. Les exploitants de bars et de cafés font ce qu’ils veulent. Des discothèques clandestines, des cheminées d’extractions trop courtes, des terrasses ou des étages sans autorisation : la situation n’est pas maîtrisée.
Mais Saint-Géry est un quartier animé et plutôt agréable, non?
On n’a jamais demandé que les bars ferment à 22h. On habite dans le centre et on sait à quoi s’attendre. Mais de là à ne pas dormir avant 5h du matin ? Il y a deux Saint-Géry. En journée, c’est vrai, c’est merveilleux. Mais en soirée, quand d’autres cafés ferment un peu plus loin, des individus moins fréquentables débarquent. Il y a des bagarres, la police débarque sans arrêt. Le quartier redevient dangereux.
Vous reprochez aussi une certaine homogénéité des commerces.
Ca pose un problème de citoyenneté : est-ce le développement normal d’une ville que de cloisonner son activité économique ? On a la Rue Neuve, la Rue des Pitas, la Rue des Bouchers… Maintenant, on a Saint-Géry pour les cafés. Ce n’est pas sain.
Pourtant, Saint-Géry est plutôt couru.
Il y a 25 ans, Saint-Géry était dangereux. Mais grâce aux efforts conjugués, quoique non-concertés, de la Ville, de l’Horeca et des habitants, Saint-Géry soit redevenu attrayant. Ceci dit, après des professionnels comme Frédéric Nicolay (à l’origine du Roi des Belges, du Mapa Mundo, du Zebra ou du Central, N.D.L.R.), c’est un peu le tout-venant qui s’installe. L’Horeca turbine à plein ici : les gens se donnent rendez-vous et si le premier café est plein, ils vont dans le second. Ils servent quand même tous la même bière…
D’où une surenchère de l’offre, des nuisances ou des irrégularités?
Ils se transforment tous en discothèques. Les murs des appartements en tremblent. Certains bars occupent des premiers étages sans autorisation. D’autres laissent entrer trop de public, malgré les recommandations des pompiers. C’est un risque physique pour ces gens : si le feu se déclare, ça sera un drame national. Avec l’interdiction du tabac, les fumeurs se rejoignent aussi sur le trottoir. Avec leurs boissons. On pourrait par exemple commencer par interdire de consommer à l’extérieur: ça limiterait les nuisances. Mais les bars font preuve de solidarité entre eux et sont donc peu coopérants.
Vous dites aussi qu’à Saint-Géry, tout le monde est client de tout le monde. Pourquoi?
Quand la loi n’est pas respectée, le politique non plus. Il est méprisé car l’Horeca fait ce dont elle a envie ici. Le citoyen n’a plus de droits et tout le monde se transforme en client à consoler d’élections en élections. J’ai un exemple assez frappant : l’un des membres du conseil communal exploite un café à Saint-Géry. C’est très bien qu’il ait cette activité économique. Mais il est aussi membre du conseil de police. Alors quand les jeunes flics débarquent pour tapage nocturne, il montre sa carte. Et comme de lui dépendent les avancements… Ce n’est qu’un exemple, cependant, je tiens à le souligner.
Où en est le dossier?
On a eu plusieurs réunions avec la Ville. Ça avance. On se sent écouté. Penser à transformer Saint-Géry en piétonnier, c’est bien. Mais ça, c’est le futur. Au quotidien, on voudrait dormir: les autorités doivent faire respecter leurs lois. Qu’elles fassent leur boulot.
 

Quelles nuisances? Quelles infractions? 
Les riverains de Saint-Géry compilent les nuisances qu’ils observent au jour le jour dans leur quartier. Florilège.
+ Le Mapa Mundo a fait une demande d’extension à la maison voisine. La commission de concertation de la Ville a donné un avis négatif.
+ Le Budhasia organise des soirées dansantes sans autorisation
+ Le Rêve d’Asie ne respecte pas les normes relatives aux odeurs : ses cheminées ne sont pas assez hautes
+ Le Central organise 3 ou 4 soirées DJ par semaine. Et accueille davantage de personne que les 80 réglementaires décidées par les pompiers. Ses cheminées d’extraction de fumée ne sont pas conformes
+ Le Java organise des soirées DJ
+ Le Bar en Face entretient un dancing non-autorisé
+ Le Mezzo a une sono qui contrevient à la réglementation sur le bruit
+ Les cheminées de plusieurs restaurants de la Rue Van Praet ne sont pas assez hautes
+Le Roi des Belges et le Mapa Mundo exploitent leurs premiers étages sans autorisation